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4 août 2015
L’ASE
(Barnevernet) et les nouveaux habits de l’empereur
Par Erik Rolfsen
avocat
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Cet article a été publié en norvègien
dans le journal Tidens
Krav à
Kristiansund le 27 juillet 2015. L'article est publié
içi en français avec l'accord de l'auteur.
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Barnevernet (en français : l’Aide Sociale à l’Enfance
– ASE) fait un travail important et le fait souvent bien.
Mais Barnevernet fait aussi des erreurs. Ces erreurs ont
d'énormes conséquences pour la vie de ceux qui sont
impliqués: les deux parents et les enfants.
Pour éviter de telles erreurs et protéger les intérêts des
parties privées, le système est non seulement très coûteux
mais aussi peu approprié quand il s’agit de corriger
Barnevernet lorsqu’une erreur est faite. Ceci est donc
source de grande préoccupation.
Afin d’assurer une protection juridique à ceux qui sont
touchés alors que Barnevernet retire la garde d’un enfant à
ses parents, les parents ont droit à une assistance
juridique (avocat payé par l’état) et à l’évaluation, par
le tribunal, de la décision du retrait de l’enfant.
Au cours de ce processus, un expert psychologue va établir
un rapport. Ainsi, des essais d’environ 3 jours sont mis en
œuvre et financés par le ministère public, faisant
intervenir les acteurs suivants: 3-4 avocats, deux membres
du personnel de Barnevernet, un expert psychologue, un juge
juridique et 2-4 autres juges.
S’il est fait appel du verdict, tous se rassemblent une
nouvelle fois et ce, encore aux frais de l’état.
Si jamais les dépenses engagées ont conduit à une meilleure
protection juridique pour les enfants et leurs parents, ce
n’est pas le cas aujourd'hui.
Il y a deux facteurs particuliers qui font que le système
ne fonctionne pas:
• Le terme
«meilleur intérêt de l'enfant» est vide de sens
• Les experts sont embauchés et payés par l'une des
parties, Barnevernet.
Ici, nous parlons des nouveaux habits de l'empereur: Beaux
et coûteux tissus (lire les termes et le processus) vus de
l’extérieur et irréprochables. En réalité, il n’y a que du
vent et du spectacle.
Le terme «le meilleur intérêt de l'enfant» semble si juste
et si bienveillant. Le problème est que, malgré le fait que
«le meilleur intérêt de l'enfant» est un terme juridique et
est utilisé dans le texte de la loi (Barnevernloven § 4-1),
il a une teneur indéterminée. Il n'y a pas de critères
objectifs et mesurables. En outre, on doit se demander qui
est la personne la plus compétente pour évaluer «le
meilleur intérêt de l’enfant» dans une situation donnée.
Dans les nombreux cas où les parents sont sujets à une
toxicomanie grave, ont des diagnostics psychiatriques
lourds ou font preuve de violence, il n’est pas difficile
de justifier que «le meilleur intérêt de l'enfant» est que
Barnevernet prenne soin de l’enfant.
Mais le terme est également utilisé dans les cas où ces
conditions sont absentes. Les enfants sont retirés à leur
parent biologique (le plus souvent la mère) même si elle ne
fait pas usage de drogue, n’est pas une malade mentale ou
qu’elle ne manifeste aucun comportement violent parce
Barnevernet est d'avis que ce serait dans « le
meilleur intérêt de l'enfant ».
Si la mère s’oppose au retrait de son enfant, Barnevernet
engage un expert, généralement un psychologue, qui fera une
enquête et émettra sa recommandation dans un rapport.
L’expert est choisi, engagé et payé par Barnevernet. C’est
Barnevernet qui introduit le psychologue en la matière,
détermine le mandat de l'enquête et soumet ses documents
(souvent plusieurs centaines de pages). Plus tard, l’expert
rencontre la mère à 2 ou 3 reprises et observe la mère et
l'enfant réunis 1ou 2 fois. Puis vient le rapport qui,
presque systématiquement, soutient fermement la vision
originale de Barnevernet.
Lorsque l'affaire est portée devant le « Fylkesnemda »
(Tribunal spécial), le rapport est essentiel pour le
résultat. Pas étonnant. Comment un tribunal, dirigé par un
avocat, peut-il contredire un expert dans le domaine
lorsqu’il s’agit de quelque chose d'aussi indéterminée que
l'expression «le meilleur intérêt de l’enfant»?
Devant le tribunal, la mère présente ses témoins qui sont
souvent des camarades, des frères ou sœurs ou ses parents,
et peut-être une infirmière qui disent qu'elle est une
bonne mère. Barnevernet a, en plus de ses propres employés,
un spécialiste faisant preuve d’une ancienneté de 5 à 7 ans
dans l'éducation.
La mère est abattue, et personne ne remet en question le
fait que l'expert soit engagé et payé par Barnevernet.
L'expert sait que la mère ne va jamais commander un rapport
à l'avenir pendant que Barnevernet d’une petite ville
achète 5-10 de ces rapports par an.
Le tragi-comique est que, si le verdict est contesté en
appel à la Cour de district, la même situation se répète.
Le juge de la Cour de district donnera un poids décisif à
ce même rapport et au témoignage de ce même expert. Le
résultat est donc identique.
Des centaines de millions de couronnes sont déboursées pour
les experts, avocats et juges alors qu'une grande partie
des ressources de Barnevernet est utilisée pour mettre en
œuvre des essais sans que l’on ait une protection juridique
satisfaisante des enfants et de leurs parents contre les
abus de la Barnevernet.
Ainsi s’est développée une industrie particulière, très
profitable, appelée la Protection d'enfants.
Voilà sans doute pourquoi personne ne crie: L'empereur est
nu!
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Erik Rolfsen,
avocat
Advokathuset Kristiansund,
http://www.advokathuset-kristiansund.no
Tel : + 47 992 98 999, rolfsen@advokathuset-kristiansund.no
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